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L’éducation permanente au service de l’alliance inclusive

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En raison de mes racines juives, le Mois de l’histoire des Noirs me fait penser à l’importance des allié.e.s et des alliances dans la bataille contre les préjudices de la racialisation et de l’injustice raciale. Le 27 janvier marque la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste. Pour beaucoup, l’Holocauste est un événement historique, survenu à un moment et un lieu précis : la persécution et le génocide systématiques et cautionnés par l’État de près de six millions de personnes juives européennes durant la Seconde Guerre mondiale dans les années 1940. Pour ma part, cet événement a marqué l’histoire et la vie des membres de ma propre famille, mon père, seul survivant de sa famille immédiate, ayant été déplacé de force. Cette persécution a eu lieu à la vue de milliers, de millions de témoins qui sont restés sans rien faire. Mais certain.e.s ont agi, pour secourir ou sauver des victimes – souvent de parfait.e.s inconnu.e.s – et pour se lever devant ce système de persécution.

Aujourd’hui, dans la foulée d’exemples frappants d’injustice sociale et de violence systémique contre certains groupes racisés, les alliances inclusives sont plus importantes que jamais pour bâtir une société juste. Une alliance inclusive se définit de plusieurs façons, mais la définition de l’ trouve un écho particulier dans le contexte de l’éducation permanente : « une pratique active, constante et soutenue de désapprentissage et de réévaluation par laquelle une personne en situation de pouvoir et de privilège cherche à agir par solidarité avec les groupes marginalisés », dans le but de rééquilibrer le pouvoir et de mettre fin aux inégalités systémiques et à la violence sociale.

Les établissements d’éducation permanente comme le nôtre se voient souvent comme un point d’accès pour les communautés marginalisées. L’acte de désapprendre et d’apprendre a une place centrale dans la manière dont l’éducation permanente peut et doit servir de plateforme pour l’alliance inclusive. Alors, qu’est-ce que ça veut dire exactement? Pour certains, cela veut dire que nous devons reconnaître les accomplissements de bon nombre de nos apprenant.e.s, collègues, ami.e.s et membres de nos familles noir.e.s, mais aussi les batailles qu’ils et elles mènent en continu, pas seulement durant le mois de février, mais toute l’année durant. Cet engagement est celui d’une vie. Il nécessite que nous nous livrions à une écoute active, que nous réfléchissions et que nous réagissions de manière à procurer à l’autre l’espace et le soutien qui lui permettront de s’exprimer – même lorsque notre propre personne ou position de privilège s’en trouve menacée.

Pour revenir à la question de privilège, notre premier instinct serait de le nier. Mais considérez ceci : selon Statistique Canada, en 2021, les personnes noires représentaient 4,3 % de la population canadienne, et 40 % d’entre elles étaient nées au pays. Moins de 2 % des étudiant.e.s postsecondaires sont noir.e.s. Plus d’un tiers des victimes d’homicides sont racisées, et de celles-là, 50 % sont noires. Je pourrais citer d’autres exemples qui mettent en lumière les effets négatifs disproportionnés du racisme systémique. La plupart de celles et ceux qui ne s’identifient pas comme personnes noires ne sont pas mis.e.s à l’écart ou réprimées de cette façon. Nous n’avons pas à faire des pieds et des mains pour surpasser les attentes et prouver que nous méritons notre place. Et cela aussi, c’est un privilège.

Comment pouvons-nous être de puissant.e.s allié.e.s de la communauté noire dans la salle de classe, au travail et ailleurs? De plusieurs façons : en nous attaquant avec dynamisme aux enjeux qui nuisent aux communautés noires, en soulignant les contributions intellectuelles et concrètes de chercheur.e.s et praticien.ne.s noir.e.s, et en offrant des environnements d’apprentissage inclusifs, ouverts aux désaccords et aux différents points de vue. Nous devons d’abord et avant tout nous éduquer et assumer la responsabilité de cette éducation plutôt que d’en imposer le fardeau à celles et ceux qui sont déjà marginalisé.e.s. Et nous devons travailler activement pour céder notre privilège aux personnes dont les voix ne sont pas entendues : dénoncer les pratiques ou les décisions discriminatoires, même si les personnes les plus touchées ne font pas partie de la discussion, et dénoncer le racisme à chaque occasion.

Mais la ligne est mince entre alliance fructueuse d’une part et alliance performative et appropriation culturelle d’autre part. Par exemple, on peut exprimer son soutien à « la cause » sans activement se consacrer à changer sa propre vie ou sa compréhension de ce qui alimente le racisme systémique. Ou encore limiter ses actions à des publications occasionnelles sur les réseaux sociaux, participer à une parade ou une manifestation pour quelques heures, ou chercher la reconnaissance en exprimant sa solidarité d’une voix qui étouffe celle des personnes réellement marginalisées et ignorées. Il n’est pas suffisant d’écouter de la musique, de s’intéresser à des œuvres ou des livres d’artistes noir.e.s, de porter des accessoires et vêtements « d’inspiration africaine » ou de s’approprier d’autres éléments de ce que la culture populaire identifie comme appartenant à la culture « noire » pour être un.e bon.ne allié.e.

En tant que personne d’ascendance européenne ayant un statut socio-économique me permettant de vivre et de travailler de manière relativement confortable sans craindre pour ma vie, je suis très privilégiée. Comme nous le faisons en éducation permanente, je dois continuellement désapprendre pour activement apprendre et rester à l’écoute et devenir un moteur de la lutte antiraciste. Je choisis d’utiliser ce privilège le mieux possible – même si je n’y arrive pas toujours – pour me rappeler à moi-même et aux personnes qui m’entourent que nous ne pouvons pas rester les bras croisés en silence; que la douleur, la souffrance et le fardeau démesuré imposé à certains membres de la société humaine PEUVENT être évités et vaincus.


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